dimanche 4 juillet 2010

En passant...

Marcel PROUST,  Pastiches et mélanges, L'imaginaire Gallimard, Paris, 1992 (286 pages) D'autres éditions sont disponibles.

Je me suis donné tantôt un petit plaisir guère avouable. Ayant eu à replacer, à la suite des travaux, les livres de ma bibliothèque, j'ai pris le Contre Sainte-Beuve de la Pléiade et, dans les Mélanges  qui précèdent ce titre, ai lu et relu, avec une tasse de thé wulong, les Journées de lecture. Trente-quatre pages. Sur la terrasse, tout juste la rumeur de la ville, vers 16h dimanche, les sirènes se sont fait oublier, jusqu'à l'angélus du soir à l'église du quartier.  On n'en parle pas. Lecture et lecteur par PROUST. C'est tout ce qu'il faut.

« Il n'y a peut-être pas de jours de notre enfance que nous ayons si pleinement vécus que ceux que nous avons cru laisser sans les vivre, ceux que nous avons passés avec un livre préféré. Tout ce qui, semblait-il, les remplissait pour les autres, et que nous écartions comme un obstacle vulgaire à un plaisir divin : le jeu pour lequel un ami venait nous chercher au passage le plus intéressant, l'abeille ou le rayon de soleil gênants qui nous forçaient à lever les yeux de la page ou à changer de place, les provisions de goûter qu'on nous avait fait emporter et que nous laissions à côté de nous sur le banc, sans y toucher, tandis que, au-dessus de notre tête, le soleil diminuait de force dans le ciel bleu, le dîner pour lequel il avait fallu rentrer et pendant lequel nous ne pensions qu'à monter finir, tout de suite après, le chapitre interrompu, tout cela, dont la lecture aurait dû nous empêcher de percevoir autre chose que l'importunité, elle en gravait au contraire en nous un souvenir tellement doux (tellement plus précieux à notre jugement actuel que ce que nous lisions alors avec amour) que, s'il nous arrive encore aujourd'hui de feuilleter ces livres d'autrefois, ce n'est plus que comme les seuls calendriers que nous ayons gardés des jours enfuis, et avec l'espoir de voir reflétés sur leurs pages les demeures et les étangs qui n'existent plus. »

« ... les demeures et les étangs qui n'existent plus. »

Maintenant je vais écouter du SCHUBERT par Wilhelm KEMPF, la sonate en si bémol, l'Andante sostenuto.

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